Tout le monde peut être important car tout le monde peut servir à quelque chose.
Martin Luther King
Ce que j’aime… entre autres
L’hiver, la fumée qui s’échappe en volutes grises des cheminées. Une atmosphère paisible et maternelle. La neige qu’on attend comme l’enfance. Le brouillard, ce somnifère cataleptique, qui étend son linceul vaporeux du ciel à la terre, effaçant l’un et l’autre, laissant à la vie une palpitation douce et ténue, mais constante. L’air froid qui pique et rend la peau vivante. Le ciel bleu d’une transparence liserée de rose par les premiers rayons d’un soleil blafard et la lune grosse et lumineuse de bienveillance. Le vent qui accroche des marées sonores aux branches des arbres. Les orages qui calligraphient de leurs éclairs les nuages.
Je suis l’enfant d’une bibliothèque désordonnée et rêveuse. Des livres, des mots, beaucoup, depuis l’enfance. La curiosité, une insatiable curiosité. Elle me tient en haleine depuis que je suis en âge de lire. J’ai commencé très tôt, par manque d’amis. Je dois à leur absence l’amour de la chose écrite. Et puis le temps qui filoche. La vie a d’autres chats à fouetter que nos désirs. Soigner les corps et guérir les âmes. A onze ans, cela me vint comme une évidence. Thérapeute et écrivain. Il fallait apprendre. L’ignorance est assassine. J’ai étudié. Indisciplinée, besogneuse, tiraillée entre le pragmatisme scientifique et le vagabondage intuitif. L’amour a fini par me tailler un costard pile poil à ma mesure où se nichèrent deux enfants, une fille et un garçon, celui-ci depuis longtemps perdu de vue. Des voya-ges, lancés comme autant de défis à la routine, avec l’homme de ma vie, nomade aguerri, entrecoupés de longues pauses en Espagne et en Inde, émaillées de tout ce qui fait le sel de la vie, y compris les désillusions, les larmes et les peines. Puis enfin, la voie de l’écriture – voix serait plus exact – s’est imposée à moi. J’ai une super famille, une que jamais aucun livre n’aurait pu me construire et aujourd’hui, je peux écrire parce que mon clan, me permet cette liberté. Cela aussi est un luxe.
Les mômes, leurs rires, leur immaturité. Les vieilles personnes, pour leurs regards ridés de souvenirs qu’ils taisent trop souvent.
La solitude. La Bretagne et l’Irlande.
La musique yiddish, le flamenco, la milonga et l’adagio du quintette de Schubert.
Le bleu indigo qui pète et le vert émeraude qui swingue.
Cuisiner. Me risquer à mélanger les saveurs. Au péril des goûteurs.
Me rouler les mains dans la farine. Faire des confitures.
Et le bon vin.
Et partager tout cela avec des gens que j’aime.
Mes auteurs préférés ?
Il y en a eu plusieurs, selon le moment et les circonstances. Certains sont toujours là, comme Shakespeare, Kessel, Céline, Cendrars, Dostoïevski, London, Daumal, Hugo, Zola, Auster, Roth, Appelfeld, Column Mc Cann, Cornac Mc Carthy, Yourcenar, Maxime Rodinson…. entre autres. J’ai eu ma période Camus, Van Gulik, Tchouang Tseu ou encore Tanith Lee. D’autres sont passés à la trappe, les ayant trouvés après relecture, à tort ou à raison, pauvres. Il y a ceux que je ne suis jamais arrivée à lire en entier, comme Proust. Un jour peut-être…
Et puis cette réflexion de Saramago : La vraie révolution qui manque est celle de la bonté. »