Ce texte que je dois à mon ami Hubert Letiers, homme d’une grande générosité et lui-même écrivain, aujourd’hui disparu, a servi en partie au quatrième de couverture.
« De la lande irlandaise aux montagnes indiennes de Panchgani, en passant par l’exubérance intimiste de Venise, puis le cœur sans faste d’Istanbul, Mélanie Talcott nous entraîne dans un pèlerinage hors-sol.
À chaque étape, la jeune Amah, une rescapée de la fatalité, va peu à peu remonter le cours de sa vie, en quête de « sa sentinelle perdue », croisant d’improbables mais authentiques personnages, qui tous portent sur l’existence un « regard qui dénude ».
Chaque geste y a son éloquence. Chaque silence y reste habité. Chaque décorum dévoile sa propre mémoire. Chaque « bouffe » y ponctue une philosophie. Toutes les fausses coïncidences et les vraies ubiquités y étayent un destin. Dans un monde « où le tragique n’abdique jamais », pour tous ces personnages l’Amour et l’Amitié restent toutefois omniprésents.
Quant à la musique et aux grands écrivains dont l’âme flotte dans les dialogues, ils nous rappellent que « sans histoire, les objets ne sont rien » ; que survivre tel que nous le faisons, c’est-à-dire enclavés dans nos illusions et nos mythes, demeure une forme d’esclavage ; et « qu’il faut savoir aimer le mystère de la vie sans chercher à le vaincre… »
Les personnages qui balisent le parcours d’Amah, qu’en dire, tant ils sont finement campés ? Rien de plus, si ce n’est qu’au fil des pages, ils se dessinaient l’un après l’autre, juste en face de moi, si différents, si complémentaires, si complexes et transparents à la fois… Et moi, taraudé par une envie prégnante : celle de passer derrière l’écran pour qu’ils m’invitent dans leur cercle de Vérité.
Et les paysages me demanderez-vous ?… Ils sont criants de réalisme et évidents d’esthétisme. Probablement grâce à cette singularité qu’a l’auteure de savoir contraster les mondes en trompe l’œil qui cohabitent toujours sous une même latitude.
Quand je referme un livre en me demandant comment contenir l’émotion qui m’incite à rester assis… force m’est d’accepter qu’il s’est produit en moi quelque chose d’inhabituel. Le métronome de nos âmes est inracontable, incompressible. Il ne se lit pas, il se vit, c’est ce qui fait sa puissance. En écrivant cette critique très personnelle, je viens de comprendre pourquoi j’étais resté assis. Sûrement à cause d’une des morales qui en suinte : « vivre sans prendre le temps de s’intéresser aux autres, c’est choisir de mourir par anticipation. »